Libye : Les dessous de l'intervention militaire française

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http://voyagesdepapanou.com/carte_libye%20copier.jpgLe monde semble marcher allègrement sur la tête, privé de loi, donc de lumière. Si les manifestants tunisiens et égyptiens ont, à juste cause, reçu le soutien des instances internationales, c'est que, armés de leurs seules convictions, ils bravaient les chars de dictatures séniles, corrompues et inefficaces. Mais il en va autrement de la Libye.

Moummar Khaddafi, malgré ses frasques et ses humeurs cyclothimiques, a pu regrouper des tribus bédouines sous son Livre Vert et fait de sa Jamahiriya une nation. Depuis 2007, la Libye est le pays le plus développé d'Afrique si on se réfère à l'Indice de développement humain établi par le PNUD. Avec 12 020 dollars par an, les 6 millions de Libyens ont le plus haut revenu d'Afrique. Pour combler le déficit en eau de ce pays désertique, Khaddafi a initié le projet pharaonique de la Grande Rivière Artificielle en 1980.D'un coût de 30 milliards de dollars, ce projet, qui fait l'admiration générale, a édifié un réseau de canalisations, de réservoirs et de stations de pompage, amenant 5 millions de m3 par jour dans toutes les régions, y compris Benghazi, fief du roi déchu Idriss 1er. Mieux, Khaddafi a renoncé à ses armes nucléaires, à ses attaques terroristes, et commencé à investir massivement dans les nations-soeurs du continent et même dans les économies euro-américaines en quête d'argent frais. Qui ne connaît, par exemple, la LAFICO, fonds d'investissement libyen crée en 1981 et présent, à travers des prêts et des prises de participation, dans 41 pays et 120 institutions économiques? Khaddafi était donc en train de corriger les erreurs du passé et de faire évoluer son pays du statut de paria à celui de chouchou du monde. Il n'est, pour s'en convaincre, que de se rappeler comment, au grand dam du protocole de ses hôtes, il fut admis, lors de visites d'Etat, à planter sa tente à Rome puis dans la cour de l'Elysée! Et quand Khaddafi, suite à l'arrestation de son fils en Suisse, a appelé au "Jihad" contre ce pays, l'Amérique s'est moqué de cet appel avant d'envoyer Jeffrey Feltman, secrétaire d’Etat adjoint pour le Proche-Orient, présenter à Khaddafi les excuses personnelles de Barack Obama. Bref, Tripoli était devenu le carrefour où se croisaient, frissonnants d'espoir, les hommes d'affaires et dirigeants européens et américains, qui pour vendre des avions de guerre à prix d'or, qui pour mendier une concession dans cette éponge à pétrole que constitue le sous-sol libyen.

Et voilà, soudain, qui surgissent du diable vauvert une bande de tueurs marchant sur les béquilles prêtées par Al-Qaida et qui seLe monde semble marcher allègrement sur la tête, privé de loi, donc de lumière. Si les manifestants tunisiens et égyptiens ont, à juste cause, reçu le soutien des instances internationales, c'est que, armés de leurs seules convictions, ils bravaient les chars de dictatures séniles, corrompues et inefficaces. Mais il en va autrement de la Libye.

Moummar Khaddafi, malgré ses frasques et ses humeurs cyclothimiques, a pu regrouper des tribus bédouines sous son Livre Vert et fait de sa Jamahiriya une nation. Depuis 2007, la Libye est le pays le plus développé d'Afrique si on se réfère à l'Indice de développement humain établi par le PNUD. Avec 12 020 dollars par an, les 6 millions de Libyens ont le plus haut revenu d'Afrique. Pour combler le déficit en eau de ce pays désertique, Khaddafi a initié le projet pharaonique de la Grande Rivière Artificielle en 1980.D'un coût de 30 milliards de dollars, ce projet, qui fait l'admiration générale, a édifié un réseau de canalisations, de réservoirs et de stations de pompage, amenant 5 millions de m3 par jour dans toutes les régions, y compris Benghazi, fief du roi déchu Idriss 1er. Mieux, Khaddafi a renoncé à ses armes nucléaires, à ses attaques terroristes, et commencé à investir massivement dans les nations-soeurs du continent et même dans les économies euro-américaines en quête d'argent frais. Qui ne connaît, par exemple, la LAFICO, fonds d'investissement libyen crée en 1981 et présent, à travers des prêts et des prises de participation, dans 41 pays et 120 institutions économiques? Khaddafi était donc en train de corriger les erreurs du passé et de faire évoluer son pays du statut de paria à celui de chouchou du monde. Il n'est, pour s'en convaincre, que de se rappeler comment, au grand dam du protocole de ses hôtes, il fut admis, lors de visites d'Etat, à planter sa tente à Rome puis dans la cour de l'Elysée! Et quand Khaddafi, suite à l'arrestation de son fils en Suisse, a appelé au "Jihad" contre ce pays, l'Amérique s'est moqué de cet appel avant d'envoyer Jeffrey Feltman, secrétaire d’Etat adjoint pour le Proche-Orient, présenter à Khaddafi les excuses personnelles de Barack Obama. Bref, Tripoli était devenu le carrefour où se croisaient, frissonnants d'espoir, les hommes d'affaires et dirigeants européens et américains, qui pour vendre des avions de guerre à prix d'or, qui pour mendier une concession dans cette éponge à pétrole que constitue le sous-sol libyen.

Et voilà, soudain, qui surgissent du diable vauvert une bande de tueurs marchant sur les béquilles prêtées par Al-Qaida et qui se ruent sans sommation sur les casernes libyennes, pillent les dépôts d'armes et de munitions, et se mettent à conquérir une à une des villes, le tout sur les cadavres sanguinolents des fonctionnaires égorgés et les ruines fumantes des édifices publics incendiés! Faut-il assimiler ces bandits à des manifestants pacifiques ? Faut-il prendre ces assaillants assoiffés de sang pour des démocrates en quête d'élections ? Non! Ces hommes et ceux qui les arment sont mus par un seul sentiment: renverser, par la force, le pouvoir en place et désigner un calife à la place du calife.

Le pire n'est pas l'offensive rébelle elle-même, mais bien l'interdiction faite à Khaddafi de se défendre. Comme si les Occidentaux portaient des lunettes en bois, ils ordonnent à la victime de laisser faire le bourreau et de jouer le rôle, combien triste, d'agneau du sacrifice ! Cet ordre injustifiable ne se fit d'ailleurs pressant qu'au moment où Khaddafi, revenu de sa stupeur initiale, parvenait à retourner en sa faveur l'avantage des armes. Et comme le "Guide de la Révolution" fait la sourde oreille, l'ONU entre en scène. Cette malheureuse marionnette - ce "machin", dirait le général De Gaulle- dont les fils sont tirés par l'Amérique et ses alliés vote une résolution autorisant le recours à la force pour instituer une "zone d'exclusion aérienne" en Libye. L'encre de la résolution n'est pas encore sèche que tombent déjà sur Tripoli les missiles de croisière et les bombes à laser de la coalition occidentale qui s'est auto-désignée pour l'exécuter. Il s'agit, officiellement, d'empêcher l'aviation libyenne de s'en prendre aux troupes rebelles; mais c'est sur le plan officieux que la véritable intrigue se joue.

En effet, la principale motivation des Occidentaux est économique. Ayant vu la limite de ce que Khaddafi serait prêt à leur concéder dans l'exploitation - j'aillais dire le pillage - des richesses libyennes, ils veulent une nouvelle équipe dirigeante en Libye, taillable et corvéable à merci et décidée, moyennant son installation au pouvoir, à mettre le pays en coupes réglées. Et il y a vraiment, en Libye, de quoi récolter du butin. Voyez les chiffres...

La Libye, bordée au Nord par la mer Méditerranée, à l'Ouest par l'Algérie et la Tunisie, au Sud par le Niger et le Tchad et à l'Est par le Soudan et l'Égypte, est le 4ème pays le plus vaste d'Afrique avec 1. 759. 540 km2. On comprend que ce pays, par sa position géographique et sa superficie, soit l'objet de convoitises de la part des Américains qui ont toujours souhaité y maintenir des bases militaires mais qui, en 1970, se sont vus obligés par Khaddafi, nouveau maître de Libye, de fermer leur complexe militaire de Wheelus Field, près de Tripoli. Quant à la France, elle a dû, le 10 août 1955, bien avant les Américains, évacuer ses 400 soldats stationnés au Fezzan. Mais passons...

La Libye, avec 1, 8 million de barils par jour, est le 2ème producteur de pétrole en Afrique, juste après le Nigeria. Mais il dispose de la plus grande réserve de pétrole en Afrique, avec des réserves de 46, 4 milliards de barils en 2011. C'est donc un acteur majeur de l'Organisation des pays exportateurs de pétrole (OPEP). Au pétrole s'ajoute le gaz naturel dont les réserves atteignent 1.548 milliards de m3. L'enjeu de la richesse pétrolière et gazière libyenne est stratégique. De fait, au moment où le pétrole se fait rare dans le monde, que l'émergence de la Chine entraîne une course aux sources d'énergie et que les crises se multiplient au Moyen-Orient, berceau du pétrole mondial, l'Occident a un besoin vital de trouver en Libye un fournisseur régulier et un acteur pétrolier capable, par sa production, de maintenir les prix à des niveaux abordables. Or Khaddafi, dont on connaît l'imprévisibilité, n'est sûrement pas ce partenaire sur qui l'Occident pourrait se reposer sans risque.

De plus, le pétrole libyen est de qualité, peu cher à produire et proche des centres de consommation. Les structures de production du pays ayant été sinistrées par l'embargo institué par l'ONU en 1986 et levé seulement en 2003, il y a donc un déluge d'argent à gagner dans les travaux de renovation de l'outil pétrolier et économique de la Libye: si les Occidentaux parviennent à installer leur homme à Tripoli, l'affaire sera dans le sac! Surtout si l'on arrive (et on y arrivera!) à convaincre cette marionnette qui occuperait le pouvoir en Libye de changer la loi qui accorde à l'entreprise pétrolière nationale National Oil Corporation une participation majoritaire dans le capital de toute société pétrolière étrangère qui s'installe sur le territoire!

Et ce n'est pas tout...La Libye possède de l'argent frais: 135 milliards de dollars en liquides et 80 milliards de réserves de change à la Banque centrale. Le pays est prêt à investir dans tous les domaines à travers ses 5 fonds d'investissement: Libyan Investment Authority Sovereign Wealth Fund (LIA), Economic and Social Development Fund (ESDF), Libya Africa Investment Portfolio (LAIP), Libyan African Investment Company (LAICO), Libyan Foreign Investment Company (LAFICO) et à travers une banque: Sahel-Sahara Bank for Investment and Trade (BSIC). Le LIA a déjà investi en France 4 des 7 milliards d’euros investis en Europe. Les fonds libyens ont déjà effectué aux Etats-Unis des dépôts bancaires d'au moins 20 milliards de dollars. Ils ont sauvé des entreprises italiennes et espagnoles de la faillite et acquis des parts sociales dans des fleurons industriels européens comme Vinci, Veolia, Suez, BNP Paribas, Italcimenti. Si les Occidentaux parviennent, à travers leurs marionettes installées au pouvoir à Tripoli, à avoir la haute main sur la gestion de ces fonds, ils ne connaîtront plus cette lugubre crise qui, ces trois dernières années, a failli mettre le système capitaliste lui-même au tombeau.

Au-delà du secteur pétrolier, les spécialistes évaluent les opportunités immédiates d’investissement en Libye à 100 milliards de dollars, trois fois plus que "le marché du siècle" (35 milliards de dollars) adjugé cette année à l'avionneur Boeing. Actuellement, les autorités libyennes dépouillent l’appel d’offres lancé pour la construction du métro de Tripoli. Elles vont aussi attribuer des contrats dans le réseau de distribution d’eau. Si les entreprises Occidentales s'assurent ces marchés et les suivants, tout ira pour le mieux dans le meilleur des mondes au pays de Voltaire comme au pays de Lincoln avec, à la clé, la réélection de candidats aussi menacés que Sarkozy et Obama.

Voilà le butin que lorgne l'Occident. La démocratie et la liberté ne servent qu'à épater les sots. Si l'Occident croit vraiment à ces slogans, qu'attend-il pour couper le bras par lequel Israël tue chaque jour des milliers de Palestiniens? Qu'attend-il pour chasser du pouvoir le président yémenite Saleh et le roi de Bahrein ? Que n'institue-t-il une "zone d'exclusion aérienne" en Tchétchénie ? Que n'envahit-il l'Iran où, on plus de martyriser l'opposition, le pouvoir mijote des armes nucléaires ? Le cas libyen illustre, en vérité, la fable de la Fontaine où, pour exorciser le mauvais sort, l'on sacrifia le baudet, inoffensif chapardeur d'avoine, en lieu et place du lion, cruel étrangleur de proies.

Proscès Verbal (Mali)

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