Mali : Les vérités du ministre des mines sur l'exploitation de l'or

Publié le par Oussouf DIAGOLA

Les «rumeurs de la rue» à propos de l’exploitation minière, notamment celle de l’or au Mali, ne sont pas totalement fausses : l’or brut est exporté pour le raffinage à l’insu (sans contrôle) de l’Etat, le pays se contente de la quantité déclarée par les sociétés et le secteur évolue en marge du développement local, etc. Ce sont là des aveux du ministre des mines, Abou Bakar Traoré, dont la population malienne débat à longueur de journée. Le Mali se trouve dans une dynamique de relecture de son code minier. Et le ministre des mines juge que ce code «doit maintenant tourner vers le développement».

Ressource épuisable, la perspective de la production aurifère inquiète les jeunes générations qui ne cessent d’interpeller les autorités sur le danger. Sur initiative de son organisation locale membre (OLM) Bamako élite, la jeune chambre internationale du Mali (JCI-Mali) a organisé un débat autour d’un pan entier de l’économie malienne qu’est l’or. Le conférencier était exceptionnel : le ministre des mines, Abou Bakar Traoré. Et, sur injonction du ministre lui-même, il était recommandé qu’aucune question ne soit tabou pour discuter au cours de ce forum sur l’impact du secteur de l’or dans l’économie malienne.   

L’or est culturellement quelque chose de mystique dans notre société. Il a aussi économiquement été mystifié même s’il reste avéré que le secteur contribue pour plus de 160 milliards (des chiffres annoncent plus de 192 milliards) de F Cfa au budget de l’Etat. Faut-il rappeler que le secteur représente 80 % des recettes d’exportation du pays. Au Mali, sept mines d’or sont en activité. La proportion du secteur au produit intérieur brut est passée de 2 à 8 % de 1995 à 2008. Plus de 10 000 personnes travaillent dans ces sociétés pour une masse  salariale d’environ 9 milliards de F Cfa. Et les sociétés minières s’attachent à préserver leurs images (elles ont toutes des certificats ISO et sont côtés en bourse) dans le domaine de la protection de l’environnement.

Les commentaires élogieux du secteur de l’or au Mali s’arrêtent là et il s’en suit des pages noires et décevantes. L’impact réel de la production est peu visible sur les conditions de vie des populations. Le ministre, dans une démarche de défense, a indiqué à la JCI-Mali de tâcher d’être exigeant sur la vérité contre les rumeurs de la rue. Mais il a confirmé implicitement les inquiétudes soulevées par cette assistance qui avaient trait au contrôle du circuit de production de l’or par l’Etat, la participation de l’Etat au capital des sociétés, la qualification des cadres maliens pour l’exploitation de l’or, les avantages que le code minier garantit pour l’économie malienne, l’impact de la production sur le développement local, etc.

Le ministre Abou Bakar Traoré a souligné que c’est vrai que la présence de l’Etat est faible dans le contrôle de la production de l’or.

 

Tourner vers le développement

Selon lui, l’or brut est exporté dans une usine de raffinage à l’étranger sans la présence de l’Etat et c’est la valeur du lingot qui est déclaré au Mali. A son avis, des Maliens travaillent dans les sociétés mais ceux-ci peuvent être préoccupés par leur intérêt. 

«Les premiers codes sont nécessairement mauvais»,  a dit le ministre des mines. L’Etat s’est engagé dans une dynamique de relecture de son code minier. Ce code, a noté Abou Bakar Traoré, prévoit la suppression des exonérations jusqu’ici accordées aux sociétés minières sur les patentes. Ces patentes seront destinées aux collectivités (commune, cercle, région) dont les sociétés sont installés. Selon lui, ce code doit maintenant tourner vers le développement. Il y sera associé un «plate forme de développement communautaire» pour les nouvelles sociétés qui s’intéresseront à l’exploitation de l’or malien. Pour le ministre des mines, le souci commun des Maliens c’est l’exploitation judicieuse des ressources. Et à son avis, détenir une part importante dans l’actionnariat des sociétés d’exploitation minière n’est pas une bonne chose. «Prendre plus de participation [dans les actions, Ndlr], c’est prendre plus de risque»,  a-t-il indiqué à la JCI-Mali. Pour lui, un Etat trouverait mieux dans l’exploitation d’une ressource minière en s’investissant dans plus dans la qualité de la gestion des contrats d’exploitation

Seydou Coulibaly/Le Républicain

Publié dans Mali

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